La résilience est un processus d'adaptation aux défis et aux épreuves de la vie
La résilience, en tant que capacité acquise et dynamique, est un processus d'adaptation qui ne dépend pas de facteurs génétiques, mais résulte d’un ensemble de processus internes et externes qui permettent à une personne de surmonter les traumatismes et de se projeter dans un avenir plus positif.
Dans le contexte des situations de police, la résilience se manifeste dans la capacité des agents à continuer à servir et à évoluer, malgré les difficultés et les violences auxquelles ils sont confrontés. Comme tous processus psychologique elle possède des facteurs de protection mais aussi des facteurs d’anti résilience.
1. Les Facteurs de Protection de la Résilience
Plusieurs éléments favorisent le développement de la résilience, en particulier dans un environnement aussi exigeant que celui de la police.
a) L’importance des liens d’attachement dans la construction et la personnalité du policier jouent un rôle fondamental dans sa construction de la résilience. pour réussir à surmonter les difficultés du métier. Ce développement de la personnalité est crucial pour maintenir un équilibre émotionnel face aux stress du travail. L’approche proactive et orientée vers des solutions est un facteur clé pour renforcer la résilience. On notera l’importance de la capacité à résoudre les problèmes, au lieu de se focaliser sur eux.
b) Le climat social et communautaire L’environnement social immédiat est un facteur protecteur puissant. Au sein des forces de l'ordre, un climat de soutien mutuel, comme celui observé dans les unités de compagnies républicaines ou d'intervention, forme une "seconde famille". La solidarité entre collègues, qui va au-delà de la simple relation professionnelle, crée une unité de groupe où chacun se soutient face aux difficultés. Cette appartenance à une communauté solide et solidaire protège les individus contre les effets négatifs du stress et des traumatismes.
c) Une vie personnelle équilibrée. Une vie familiale équilibrée, marquée par le soutien et la sérénité, est également essentielle pour maintenir la résilience. En dehors du travail, une base personnelle solide, où l'on se sent aimé et soutenu, permet de faire face plus sereinement aux défis professionnels. La résilience sera toujours renforcée lorsqu’un agent sait pouvoir compter sur un environnement familial et social stable.
d) L'anticipation et la préparation mentale. L'un des aspects les plus importants de la résilience est la préparation en amont. En période de calme, la constitution d'un "kit personnel" de ressources, qu’elles soient psychologiques ou pratiques, devient indispensable pour faire face à des situations difficiles. Ces ressources, apprises au fil du temps, agissent comme des compétences acquises, prêtes à être mobilisées lorsque les circonstances l'exigent.
e) Une vision orientée vers l'avenir dégagée des ruminations sur le passé est un élément protecteur majeur. La "pensée épisodique future", c’est-à-dire la capacité à se projeter et à anticiper positivement les événements à venir, aide à garder un équilibre mental face aux difficultés. La résilience se nourrit de cette capacité à envisager l’avenir de manière constructive.
f) L’apprentissage des techniques d’écoute et de gestion de soi .L’écoute active de soi-même et des autres est essentielle. Des pratiques comme la méditation, la visualisation positive, ou la sophrologie permettent de renforcer la résilience en améliorant la concentration et la gestion des émotions. La réévaluation cognitive, qui consiste à percevoir les situations sous un angle positif et constructif, permet également de changer son état d’esprit et de continuer à avancer. Viktor Frankl, dans sa réflexion sur le pouvoir de choisir notre réponse face aux événements, souligne l'importance de cet espace entre le stimulus et la réponse, où réside notre pouvoir de croissance et de liberté.
g) La reconnaissance et la gratitude des chefs. La reconnaissance de la hiérarchie envers les agents joue également un rôle crucial dans le processus de résilience. Un environnement où l'effort est reconnu et valorisé aide à maintenir la motivation et l'engagement des agents, même face aux épreuves.
2. Les Facteurs de Risque pour la Résilience
Si certains réussissent à s'adapter aux difficultés, d'autres échouent, et les facteurs de risque qui inhibent la résilience méritent une attention particulière.
a) L'isolement social est l’un des principaux obstacles à la résilience. L’adage bien connu : "Qui s’isole, s’étiole" souligne l’importance de maintenir des liens sociaux. Un agent de police isolé de ses proches, sans réseau de soutien ni interlocuteurs, risque rapidement de voir son équilibre psychologique bouleversé. Le rétablissement des liens, qu'ils soient internes (avec soi-même) ou externes (avec les autres), est essentiel pour éviter la désocialisation.
b) Le non-sens de l’action. Pour un policier, la question du sens de l’action est fondamentale. L’incapacité à attribuer un sens à une expérience vécue peut paralyser l’individu. Lorsqu’une situation violente ou traumatique est vécue sans comprendre sa signification, il devient difficile de rebondir. La quête de sens devient donc une démarche essentielle pour restaurer la résilience.
c) La honte est un facteur majeur de déstabilisation émotionnelle. Contrairement à la culpabilité, qui peut conduire à une prise de responsabilité constructive, la honte désocialise et entraine une dégradation de la triade image de soi-estime de soi et finalement c’est la confiance en soi, en son action pour le bien commun qui s’en trouvent dégradés. Un agent qui ressent de la honte à la suite d’un échec ou d’un traumatisme peut se mettre à distance de ses collègues et de ses propres ressources intérieures, ce qui inhibe sa résilience. Au contraire, l'acceptation de ses imperfections et l’apprentissage de ses propres erreurs sont des éléments clés pour avancer.
La Résilience est donc une capacité dynamique et collective pour les policiers. Elle ne réside pas uniquement dans la capacité à faire face seul aux défis, mais dans la manière dont les agents, au sein d'une communauté solidaire et avec les outils adéquats, parviennent à surmonter les épreuves. En renforçant les facteurs de protection et en minimisant les facteurs de risque, ils peuvent non seulement surmonter les difficultés, mais aussi en sortir grandis et plus déterminés à servir leur mission.
Dr Gérard CHAPUT
Président Les Sentinelles de la Nation